L’Anglais rallie la salle de bain avec ces derniers mots qui tournent en tête. Merci pour la nuit. Il se demande pour quelle partie, l’avoir ramené là, lui avoir offert sa douche et plusieurs verres d’alcool. Ou si Kallen pouvait parler de cette danse qu’ils ont partagé, mais non, ce serait absurde. Autant que ses pensées qui tournent en boucle sur cette partie de la soirée.
Il se déshabille et jette sa boule de fringue dans la panière par habitude. Une fois savonné, il se laisse reposer plusieurs minutes contre le mur de pierres. L’eau brûlante caresse sa peau et durant une seconde, Avis a l’image fugace d’une main à la peau légèrement mate qui la remplace. Ça brise son souffle en un million de morceaux épars alors qu’il rouvre les yeux aussitôt, abattant une main sur le mitigeur qu’il referme un peu trop brutalement. Une chaleur qu’il connaît bien qui flotte, quelques instants, au fond de son ventre.
Il s’enroule dans sa serviette en grognant à voix basse contre lui-même. Contre cette pensée délirante venue le troubler. Il va même grogner contre ce slow qu’ils ont partagé mais il se stoppe. Parce que la chaleur se déplace de son estomac à sa poitrine puis remonte à ses joues qu’elle colore une fois de plus au cours de cette soirée, et que sans pouvoir s’en empêcher il se remet à sourire. Avant de se fâner doucement lorsqu’il se rend compte qu’il a oublié de passer par la chambre y chercher ses vêtements. Il n’est pas pudique, comme il le lui a dit plus tôt. Pourtant, l’idée de passer nu comme un ver devant son regard vert après le moment qu’ils viennent de partager le met étrangement mal à l’aise et il ne voudrait pas que Kallen le soit aussi.
Un soupir caresse sa bouche. Avis se glisse dans le couloir et toujours enroulé dans sa serviette, rallie la chambre après avoir mis comme promis les habits trempés du châtain à la machine. Un rapide coup d’œil à l’intérieur lui indique que Kallen ne devrait pas pouvoir le voir... pourtant il préfère éteindre la lumière et les rideaux fermés filtrent celle qui peut provenir de l’extérieur.
“Tu dors, Alaska ?” Avis chuchote dans le noir. “Rallume pas, je suis à poil.”
Il préfère ne pas préciser pourquoi. Parce qu’il était un peu trop accaparé par cette impression de froid au creux de son corps alors qu’une minute auparavant Kallen y diffusait sa chaleur. Parce que la douceur de leur danse tournait en rond dans sa tête, ainsi que l’odeur de sa peau.
Un tourbillon de plus étreint son ventre à ce qui n’est déjà plus qu’un souvenir et il sort du placard un boxer et un débardeur qu’il enfile rapidement. Rejoignant sans aucun mal, habitué, le grand lit quelques secondes après. Un soupir lui échappe en sentant la chaleur de la couette recouvrir son corps. Dans le noir, il tente de percevoir les traits du châtain sans y parvenir. Alors il se contente d’écouter ce son, celui de sa respiration, et il ferme les yeux pour laisser la possibilité au sommeil de le reconquérir.
Morphée le rattrape vite, heureusement. Le matin arrive et une lumière tamisée perce finalement à travers les rideaux. L’Anglais grogne un peu au moment où il s’éveille et ses yeux peinent à s’ouvrir. Il enfonce la tête dans l’oreiller quelques secondes, soupirant longuement avant d’attraper son téléphone sur la table de nuit.
“Merde !” Il jure soudainement. “Kallen, debout, il est 9h passé.”
Il ignore à quel moment il a oublié de mettre le réveil qu’il lui avait promis. Sûrement au même moment où il a oublié d’aller chercher ses vêtements avant sa douche, après tout. Il avait trois verres d’alcool dans le sang, ses émotions et ses pensées en vrac. Ça aurait pu arriver à n’importe qui, non ?
“J’ai complètement oublié le réveil, je suis désolé.”
Ashley se moquerait sans doute que c’était voulu, parce que ses dix heures de sommeil elles sont sacrées. Ce ne serait pas tout à fait faux, à vrai dire, si ça n'avait concerné que lui. Il espère que Kallen n'aurait pas d'emmerdes au boulot par sa faute.
Kallen Galloway
Messages : 133 Date d'inscription : 23/01/2022 Age : 26
Jeu 21 Juil - 18:10
Monsters in the Dark
Kallen navigue entre conscience et inconscience, ce moment précédant le sommeil où les sens s’entremêlent. Allongé la tête sur l’oreiller, il soupire de confort en se rappelant la chaleur du feu et du sable sur la plage. Il peut presque en sentir les grains et l’odeur du bois dans l’air quand la clarté des flammes disparaît au profit d’une obscurité soudaine, mais il ne s’en inquiète pas. Sans qu’il ne puisse très bien la situer, la voix d’Avis lui parvient dans les ténèbres.
-Mm… En réponse à s’il dort.
Pas tout à fait, non. Il remue pour donner signe de vie et Avis poursuit. Les mots suivants mettent un moment à atteindre son cerveau, et s’il était un peu plus réveillé, nul doute qu’il y accorderait plus d’attention.
-Mets une serviette…
D’où il sort de toute façon, du lac ? Il est tard, son corps le lui dit. Le brun s’est lancé tout seul dans un bain de minuit ? Kallen le revoit dans la baignoire chez sa tante, la surface de l’eau miroitant par-dessus les nombreux bleus et tatouages. Il l’aide à se relever, Avis s’accroche à son cou et Kallen lui noue la serviette à la taille. Ils échangent un sourire, mais aucun des deux ne bouge. Quelque chose tangue pourtant, alors qu’ils sont sur la terre ferme. Pas beaucoup, c’est très léger, comme un flottement. Les minutes passent et tout redevient immobile. Avis a perdu son sourire, le regard rivé sur lui. Des yeux gris comme l’orage qu’il entend frapper contre sa poitrine. Un vent lui balaie le cœur. Il va s’y noyer, il en est sûr.
Des heures plus tard, Kallen respire profondément sous les couvertures à côté du brun. De très loin, il distingue son prénom et marmonne quelques paroles intelligibles en retour. Un moment s’écoule et il émerge, s’étirant avant d’ouvrir un œil. Il n’a pas entendu de sonnerie, alors pourquoi Avis le réveille ? L’esprit encore embrumé, il se redresse sur un coude en ouvrant l’autre œil, puis l’explication arrive et les yeux du châtain s’écarquillent.
-Il est quelle heure ?
Sans attendre de réponse, il attrape le poignet d’Avis et tourne l’écran vers lui.
-C’est pas vrai, il est presque onze heures !
Kallen pousse un juron et bondit hors du lit. Une envie pressante le conduit à la salle de bain où il pense récupérer ses vêtements par la même occasion avant de se rappeler qu’Avis voulait les mettre à la machine hier.
-Avis, où t’as mis mes fringues ? Qu’il lâche du couloir.
Il trouve la buanderie derrière la porte juste en face et y prend son linge, mais au lieu de retourner s’habiller dans la salle de bain, Kallen repasse par l’encadrement de la chambre.
-Merde j’y pense, tu bosses toi aussi. Tu peux m’appeler un taxi ? Je te rendrai les sous, promis.
Alyssa a sûrement essayé de l’appeler à plusieurs reprises et il ne connaît pas le numéro du bureau par cœur pour la prévenir du retard. Tant pis, il s’expliquera une fois arrivé au travail. Il disparaît le temps de se changer et de glisser un chewing gum entre ses dents. Il enfile ensuite ses chaussures et revient trouver Avis. Il est prêt à y aller.
La main qui attrape son poignet est chaude et l’Anglais observe tant bien que mal à la lueur des faibles rayons qui percent les rideaux la différence entre leurs deux peaux. Celle de Kallen a vu son lot de travaux manuels et prend régulièrement le soleil quand la sienne paraît d’autant plus pâle. Il crame plus facilement qu’il ne bronze, de toute façon, comme son frère. Encore un détail qu’ils tiennent visiblement de leur mère, quand il pense à la peau hâlée de Tobias. En fait, avant ce matin-là, il ne s’était jamais posé la question. Jamais fait la remarque.
Quand Kallen se lève - bondit -, Avis reste là où il est. Il le voit se précipiter hors de la pièce à la recherche de ses fringues et il retient difficilement un rire quand il lui indique où les trouver. Qui passe finalement lorsque le châtain prend pourtant quelques secondes pour s’inquiéter pour lui. Doublement.
“T’inquiète pas pour moi, mon père comprendra.” Un sourire taquin étire son visage. “Je t’appelle ça.”
Il ne fait pas de remarque sur l’argent. Il ne compte pas lui demander quoi que ce soit au vue de ses comptes en banque relativement fournis malgré son jeune âge. À croire que ça paye plutôt bien d’être un simple mécanicien, il se moque intérieurement de son mensonge.
Il appelle le taxi. Il appelle Ashley, aussi, très rapidement. Histoire de vérifier que Tobias ne l’a pas écorché vif. Il lui raccroche au nez lorsque son frère commence l’un de ses récits interminable ; il les écoutera plus tard quand ils se retrouveront, même s’il fera semblant d’être vexé.
Un mouvement attire son attention une seconde plus tard, dans l’embrasure de sa porte de chambre.
Love of my life, don’t leave me.
La pensée traverse sa tête alors qu’il le regarde, prêt à s’enfuir. Avis remarque que Kallen n’a pas récupéré son écharpe, posée dans le salon, et un brin d’égoïsme l’empêche d’aller la chercher pour la lui passer autour du cou malgré les températures encore fraîches de l’extérieur. Le même qui lui chuchote qu’il refuse de le laisser partir tout en sachant qu’ils se reverront.
Mais quand ? L’incertitude lui déchire la poitrine alors qu’il se lève du lit. Sa tenue à lui n’aura pas eu le temps de changer, à part cette tignasse folle qu’il a noué rapidement avec un élastique qui traînait sur la table de nuit. Reste, il voudrait dire, de toute façon c’est foutu pour ce matin. Pourtant c’est loin de ce qui passe ses lèvres quelques secondes après.
“Le taxi devrait arriver bientôt.” Le type lui a dit une dizaine de minutes à peine. “Ça va aller ? T’auras même pas mangé un morceau avant de partir.”
S’il y a une chose sur laquelle l’Anglais déteste faire l’impasse c’est bien le petit déjeuner. Une dose de sucre est le meilleur des carburants à ses yeux quand le café est celui de bien d’autres personnes. Alors il se dirige vers Kallen et lorsqu’il passe à côté de lui peut-être que son épaule ne frôle pas la sienne uniquement par inadvertence. Qui pourrait l’affirmer, cependant ?
Il rejoint la cuisine et rapidement il récupère une boîte qu’il ouvre, dont il sort deux beaux muffins, qu’il place dans un sachet par la suite. Qu’il vient lui déposer entre les mains, s’approchant sûrement juste un peu trop près. Pour accrocher son regard une dernière fois au sien et savourer les éclats uniques qui le parsèment.
“Tu n’es pas autorisé à les refuser.” Il laisse tomber. “Pépites de chocolat. Les prochains seront aux myrtilles, faudra que tu reviennes les goûter.” Est-ce qu’elle se passera comme ça aussi, la prochaine fois ? “Merci à toi aussi pour cette nuit.” Comment on dit au revoir à un type qu’on voudrait garder un peu plus longtemps pour soi ? Qu’on voudrait revoir vite parce qu’il nous fait oublier le temps et les ennuis ? “Tu me diras s’ils t’ont passé un savon au boulot.” Il ricane doucement.
Sans penser à s’éloigner d’un pas.
Kallen Galloway
Messages : 133 Date d'inscription : 23/01/2022 Age : 26
Ven 22 Juil - 17:35
Monsters in the Dark
Kallen se précipite si vite hors de la pièce qu’il ne remarque pas le calme d’Avis laissé derrière lui. Pire que ça, l’Anglais est encore dans le lit lorsqu'il réapparaît sur le seuil de la chambre avec ses fringues dans les bras. Il n’y a visiblement aucun souci à se faire pour lui, et c’est un peu ébahi que le châtain hausse les sourcils.
-Il est cool, ton père.
Ce n’est pas le sien qui aurait toléré un tel retard, mais il n’a pas le temps de s’y attarder plus longtemps, il le remercie pour le taxi et se sauve à nouveau vers la salle de bain. Il retrouve Avis après avoir sauté dans ses vêtements propres et hoche la tête, à deux doigts de filer quand le brun lui mentionne son ventre vide.
-C’est pas grave, je mangerai plus tard.
Toujours en pyjama, Avis traverse le couloir en l’effleurant et Kallen marque une pause en le suivant du regard. Il ne se rappelle pas l’avoir vu ou entendu sortir de la douche la veille, mais encore une fois, ce n’est pas le moment de s’arrêter sur des détails. Il rejoint l’entrée et lance en direction de la cuisine.
-T’embête pas, Avis.
Mais celui-ci est déjà de retour et lui met un sachet de deux muffins dans les mains, sans lui donner la possibilité de protester. Plus que l'attention, c'est la proximité qu'il remarque en premier – la même que la nuit dernière, si ce n'est qu'ils ne se touchent pas. Avis lui parle de muffins aux myrtilles et l'invite à revenir pour y goûter. Il le remercie aussi pour la nuit, et Kallen se dit qu’il n’a peut-être pas si mal interprété la danse, hier soir. Alors le châtain lui offre un sourire en même temps qu’un klaxon résonne pour annoncer l'arrivée du taxi en bas.
-T'as qu'à me dire quand. Si je peux, je viendrai. Il agite le sachet de muffins aux pépites de chocolat. Merci. Je te tiens au courant.
Sa main tourne la poignée et il recule de deux pas, sans encore se retourner.
-Tu m’en dois une en passant, pour le réveil.
Son sourire s’étire et il disparaît pour attraper son taxi. Il mange les muffins pendant le trajet jusqu’au port où il tombe sur une Alyssa plus que soulagée de le voir franchir la porte du bureau.
-Kallen ! On s’inquiétait. J’ai parlé à ta tante ce matin, elle disait que t’étais chez un ami, mais on n’avait pas de nouvelles. -Je sais, désolé. C’était pas prévu. Il y a beaucoup de boulot ? -Les gars déchargent encore la cargaison de ce matin. Je crois qu’il y en a pour un moment, on a ouvert le temps supplémentaire, tu veux rattraper tes heures ? -Ce serait super. -Ça marche, je t’inscris à l’horaire. Hum, Kallen ? -Oui ? -Ton haut est à l’envers. -Oh. Merci.
Nouveau passage obligatoire à la salle de bain, puis il se dépêche de sortir sur les quais.